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🎙 Interview Frank Carter - Mars 2018

Dernière mise à jour : 17 avr. 2020

En quinze ans d’activité et après avoir débuté au sein de Gallows, Frank Carter est devenu une figure incontournable de la scène alternative outre-manche. Après avoir ouvert pour Biffy Clyro et écumé les festivals aux quatre coins du globe l’été dernier, le groupe Frank Carter & The Rattlesnakes arrive à la fin d’une tournée européenne intense et couronnée de succès. Zyva a profité de l’étape lyonnaise au Marché Gare de Lyon pour rencontrer leur frontman.


Zyva : Hello Frank, et merci de nous accorder du temps. Apparemment ça a été une grosse journée, tu reviens tout juste d’une session acoustique et là tu vas jouer dans quelques heures…


Frank Carter : Salut. Oui, ça a été une journée un peu folle, on avait énormément de choses à caser et pour être honnête, on a pris du retard. J’avais des tatouages à faire, les médias, il a fallu traverser la ville en voiture, la session acoustique avait lieu en plein dans les heures de pointe et j’ai l’impression que la circulation à Lyon, ce n’est pas rien… Mais on a pu faire quelques chansons, tout le monde était très pro. Là on vient de rentrer, après l’interview je vais manger un bout et essayer de me détendre un peu avant de me lâcher sur scène…


Z : Ton dernier passage à Lyon, c’était en première partie de Biffy Clyro, au Radiant, tu as quelques souvenirs de ces dates en France et plus particulièrement de celle-ci ?


F.C : J’avais adoré toute la tournée, et il se trouve que oui, je me souviens plutôt bien de la date en

question : c’était un super show.


Z : Il y a probablement pas mal de gens qui ont découvert Frank Carter & The Rattlesnakes ce soir là…


F.C : Alors mission accomplie ! Quand tu assures la première partie, c’est le but. Tu es là pour

acquérir autant de nouveaux fans que possible. L’objectif à se fixer, c’est de voler la vedette au

groupe de tête d’affiche. C’est certain que Biffy Clyro ne nous a pas simplifié la tâche vu comme ils

assuraient, mais je crois pouvoir dire qu’on s’est bien défendus !


Z : Vous êtes actuellement sur les dernières dates de la tournée européenne. Il y a eu quelques dates en France un peu plus tôt, en Belgique, en Allemagne. Vous jouez tous les soirs dans des salles sold-out ou tout du moins bien remplies, et c’est vous la tête d’affiche. Quel est votre ressenti ?


F.C : C’est incroyable. Ça a été jusque là une expérience extraordinaire et même assez bouleversante. Tu sais, j’ai été dans trois groupes différents et ça fait pratiquement 15 ans que je fais de la musique. Mais jouer un concert complet à Paris devant 700 personnes, ce n’est pas rien ! Ce n’est que récemment que l’on a atteint ce cap à Londres. Et crois-moi c’était vraiment un moment clé pour le groupe. Le lendemain de Paris, on a joué à Nantes : les gars me disaient « c’est dommage, ce n’est pas complet », mais moi j’étais là « attendez il y a 800 personnes, ça en fait 100 de plus qu’hier ! ».

On a des fans incroyables, qui s’intéressent vraiment à la musique de manière générale, et qui ont

une passion pour le rock. C’est magnifique de pouvoir jouer devant eux, de sentir leur énergie, où

que nous soyons. Cette tournée est aussi incroyable qu’elle est épuisante : je suis lessivé ! En plus je

le savais qu’aujourd’hui allait être une des journées les plus remplies… mais je suis quand même allé me coucher bourré à 4h du mat ! Une erreur de débutant ! Pourtant je n’ai pas trop fait la fête sur cette tournée. Mais là on n’était que quatre au fond du tour bus, à discuter, c’était cool… et puis je me suis réveillé en me disant « p^µ*n il s’est passé quoi hier soir ? ». D’ailleurs tu peux facilement deviner qui était de la partie car on a tous une sale tête aujourd’hui ! (rires)


Z : Je crois que vous avez une journée off demain, vous allez pouvoir récupérer un peu du coup ?


F : Oui et non. On a 16 heures de trajet pour rejoindre les Pays-Bas. Avec un peu de chance je vais dormir une partie de la journée, on verra bien !


Z : Conservez-vous déjà quelques souvenirs bien spécifiques de cette tournée ?


F.C : La date de Paris, elle va rester gravée dans ma tête un bon moment. C’était une soirée un peu

chaotique, dans le bon sens du terme ! Je pourrais aussi dire Hambourg ou Berlin. Mais j’ai un peu

l’impression que chaque concert a été encore meilleur que le précédent. Ce qui est bizarre, car il y a

toujours une ou deux dates un tout petit peu moins bonnes, mais là non. Et je trouve que les gars du groupe sont de plus en plus forts, alors qu’ils étaient déjà sacrément balaises avant le début de la tournée ! Tu sais, quand tu es sur une plus grosse tournée, avec davantage de groupes et de dates, il arrive qu’il y ait plus de jours off, pour relâcher la pression, ce que je peux comprendre. Mais pour moi c’est l’inverse : si j’en avais trop, ça me rendrait vraiment fou. C’est pour ça que j’essaie de faire le maximum de choses pour m’occuper l’esprit. En tout cas ce que je retiendrai, c’est que ça y est, le groupe marche bien en Europe, enfin. Je dis enfin même si le groupe n’existe que depuis trois ans car je n’avais jamais fait de pareils concerts en Europe, de toute ma vie. Pas plus tard qu’hier, on avait une date complète et c’était juste fou dans la fosse. J’étais sur scène avec un sourire jusqu’aux oreilles, pareil pour Dean (ndlr Richardson, guitariste). C’était un sentiment incroyable et unique.


Z : Quelle sera la suite pour Frank Carter & The Rattlesnakes ? Avez-vous déjà composé un peu pour le prochain album ?


F.C : En ce qui me concerne, je pars en vacances, à Los Angeles. Je vais faire un peu de musique, mais j’y vais surtout pour me vider la tête et me reposer. Je réalise que je ne me suis pas reposé du tout pendant ces trois dernières années. Il faut que j’apprenne à lever le pied ! Et puis il va falloir

retrouver l’inspiration. C’est marrant, j’ai toujours détesté Los Angeles. Mais lors de mon dernier

séjour, c’était tout à fait différent: je me suis rendu compte que pas mal de mes potes y avaient

emménagé et que j’y avais désormais beaucoup d’amis ! Il va faire beau, je vais voir du monde : c’est exactement ce dont j’ai besoin. J’ai beaucoup de choses en moi  et j’ai essayé plusieurs fois de me poser pour écrire, mais ce n’était pas concluant. Là on verra bien ce que ça donne. Ensuite on arrivera assez vite en juin et les premiers festivals…


Z : Dont le Download Festival Paris. L’an dernier le groupe avait joué dans plusieurs festivals français, parmi lesquels le Rock en Seine en ouverture, ce qui n’est jamais évident. A quoi vous attendez-vous, dans un festival bien plus rock et où vous partagerez la scène principale avec Foo Fighters et The Hives, entre autres ?


F.C : Je n’ai jamais d’attentes spécifiques. Seulement des exigences envers moi-même, pour assurer le meilleur show possible. On a joué dans un festival en Belgique à 11h le matin, en ouverture de la scène principale. Il pleuvait des cordes, mais il y avait pas mal de monde et on est arrivés sur scène avec du champagne car on avait un anniversaire à fêter : on a joué comme s’il était minuit et tout le public était à fond ! L’heure n’a pas d’importance, du moment que tu es sur scène. C’est pour ça que je vis ! Il m’est arrivé de monter sur scène malade, fatigué, pas forcément bien dans ma tête, mais j’ai toujours fait en sorte que de mettre un maximum d’intensité dans ma prestation.


Je voudrais revenir à la tournée actuelle et dire que j’en ai adoré chaque date. Quand j’étais plus

jeune, je trouvais ça difficile d’être sur scène, de parler, car j’étais très renfermé. Ce qui se traduisait

par un coté nihiliste, destructeur et une certaine agressivité. Bon, il m’arrive encore parfois de laisser sortir « l’animal » de sa cage mais je me contiens et me concentre mieux que dans le passé. En même temps, de tels moments t’aident à te souvenir qui tu es et d’où tu viens. C’est quelque chose qu’il faut apprivoiser, dont on doit se nourrir et non avoir peur.


Z : Tu viens d’évoquer certaines notions que l’on ressentait beaucoup sur l’album Blossom, tandis

que le dernier en date, Modern Ruin, est plus mélodique et varié. A défaut d’avoir déjà composé avec les autres membres, as-tu une idée des thèmes qui seront abordés et donc peut-être de l’atmosphère qui pourrait se dégager du prochain opus ?


F.C : Pas vraiment et c’est bien le problème. J’arrive généralement à trouver une atmosphère, le mot

est bien choisi, à partir de laquelle travailler. Mais là, ma vie a été extrêmement chaotique ces deux

dernières années sur le plan personnel, avec beaucoup de changements. Donc c’est particulièrement difficile de définir cette atmosphère. Au final, il se pourrait bien que ce soit le chaos justement… De là à dire comment ça se ressentira sur l’album, je n’en ai pas la moindre idée pour l’instant ! J’ai parlé à Dean il y un moment, en lui demandant s’il avait travaillé sur de nouveaux trucs, et il m’a dit qu’il avait bricolé quelques beats de rap pour se détendre. Il a fini par me faire écouter et c’était vraiment cool ! Tout ça pour dire que j’aimerais pouvoir inclure tous les styles musicaux qui me tiennent à cœur. En tout cas on va prendre notre temps et je suis persuadé qu’on reviendra avec un très bon album. Ça fait longtemps qu’on n’a rien écrit, donc on ne demande qu’à avoir un peu de temps pour s’y mettre. C’est aussi en partie pour cette raison que je pars à L.A. J’ai dit à Dean de venir avec moi, pour faire la fête mais aussi pour composer !


Z : Tu parles beaucoup au public avant chaque morceau. Au moment de jouer Wild Flowers, tu évoques généralement l’égalité des sexes et l’importance de montrer du respect aux femmes. A l’heure actuelle, après tout ce qui est arrivé à Hollywood dernièrement, considères-tu qu’il y a encore beaucoup de chemin à faire ?


F.C : Je crois qu’il reste énormément à faire. Nous autres les mecs devons être moins égoïstes et

davantage impliqués. Pas plus tard qu’hier, je venais à peine de dire que c’était une chanson dédiée

aux filles et qu’elles seules avaient le droit de venir sur scène et de slammer durant ce morceau, qu’un mec tentait déjà de monter ! Il s’est vraiment énervé quand on lui a expliqué que le morceau était pour les filles et qu’il devait descendre, il ne comprenait pas ! J’ai eu quelques mots avec lui, je lui répondu qu’il pouvait faire ce qu’il voulait, quand il voulait, slammer sans se poser de questions

ou craindre de se faire tripoter, d’autant qu’il était vilain et puait la sueur ! (ndlr : malheureusement

la même chose est arrivée lors du concert de Lyon durant la chanson en question…) Le but c’est de

prouver aux filles qu’elles peuvent se sentir en sécurité et respectées. D’ailleurs on voit une vraie différence à nos concerts. Il y a de plus en plus de filles aux premiers rangs. Elles vont dans la fosse,

sur scène, slamment : elles passent un bon moment et ça c’est génial ! On a une tribune pour s’exprimer, mais aussi une responsabilité, un rôle à jouer. Le but étant que tout le monde rentre chez soi en ayant passé un bon moment. Si l’on arrive à faire évoluer les mentalités pendant nos concerts, peut-être que ça incitera les gens à avoir un autre comportement par la suite et à par exemple à agir s’ils voient des comportements inappropriés. C’est à ce moment là qu’on aura gagné et que je pourrai arrêter d’en parler. Attention, je sais très bien que les femmes sont incroyablement fortes : elles se doivent de l’être, vu ce qu’elles subissent au quotidien. Je crois qu’il reste énormément à faire et en même temps je pense que l’on est à un moment crucial, où l’on peut choisir d’être un allié actif ou un ennemi. Moi je fais le choix d’être un allié.


Z : Finissons sur quelque chose de plus léger, tu sembles faire pas mal de choses pendant la tournée : du tatouage et du dessin, mais aussi de grosses session jeux vidéos notamment sur le phénomène Fortnite par exemple… Tu peux nous en dire un peu plus ?


F.C : Je passe quand même la majorité de la journée à travailler : ça peut être de l’écriture, du dessin, des tatouages ou du chant. Mais ce que j’aime par-dessus tout, c’est la peinture. Le problème, c’est que j’ai des idées qui me dépassent un peu, en termes de temps notamment : là je travaille depuis plus de six mois sur huit peintures et aucune n’est achevée. Et c’est très cérébral, je suis seul et je pars trop loin, dans ma tête. Les tatouages, c’est différent : il y a une vraie interaction avec l’autre personne. C’est assez intense, au sens où je lui laisse quand même quelque chose de permanent. J’aime à croire qu’un lien se crée. Certaines personnes appréhendent un peu car elles me voient sur scène et se disent que je suis comme ça dans la vie de tous les jours, alors que non ! J’ai besoin d’activités qui se prêtent à la méditation et je trouve que le tatouage en fait partie. Le jeu vidéo, c’est autre chose, mais c’est très important pour moi en tournée. J’aime ça depuis mon enfance et je me débrouillais vraiment bien sur les premiers Call Of Duty entre autres. Fortnite, j’y joue avec des amis, depuis quelques mois et je suis vraiment accro, c’est parfait pour se détendre. L’autre chose qui m’aide bien, c’est le yoga. C’est d’ailleurs mon rituel avant et après les concerts. C’est sûr qu’en combinant tout ça, les journées passent parfois assez vite et tant mieux !


Z : Merci pour tout Frank, je crois qu’il est temps de te laisser te préparer pour tout à l’heure. Bon concert et bonne fin de tournée !


F.C : Merci à vous, et à tout à l’heure dans la fosse j’espère !



© YANN B. & KYMMO

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